Le Conseil de surveillance annule la décision de Facebook : Cas 2020-002-FB-UA
28 janvier 2021
Le Conseil de surveillance a annulé la décision de Facebook de supprimer une publication en vertu de ses Standards de la communauté relatifs au discours haineux. Le Conseil a estimé que, si la publication pouvait être considérée comme offensante, elle ne pouvait toutefois pas être qualifiée de discours haineux.
À propos du cas
Le 29 octobre 2020, un utilisateur au Myanmar a publié dans un groupe Facebook en birman. La publication contenait deux photos, largement partagées, montrant un enfant syrien d’origine kurde qui s’était noyé en essayant de rejoindre l’Europe en septembre 2015.
Le texte qui accompagnait les photos déclarait que quelque chose ne tournait pas rond chez les musulmans (ou chez les hommes musulmans). Il remettait en question le manque de réaction des musulmans en général face au traitement réservé aux musulmans ouïghours en Chine, par rapport aux attaques meurtrières perpétrées en France en réponse aux caricatures du prophète Mahomet. Pour conclure, la publication affirmait que les utilisateurs avaient moins de compassion pour l’enfant de la photo en raison des évènements récents qui avaient eu lieu en France et semblait insinuer que l’enfant aurait pu devenir un extrémiste.
Facebook avait supprimé ce contenu en vertu de ses Standards de la communauté relatifs au discours haineux.
Principales observations
Facebook a supprimé ce contenu en raison de la phrase « Quelque chose ne tourne pas rond chez les musulmans ». En effet, les Standards de la communauté relatifs au discours haineux interdisant les déclarations qui généralisent l’infériorité mentale d’un groupe en raison de sa religion, Facebook avait supprimé la publication.
Le Conseil a considéré que même si la première partie de la publication, prise seule, pouvait sembler insulter les musulmans (ou les hommes musulmans) de façon générale, la publication devait être lue dans son ensemble, en tenant compte du contexte.
Alors que Facebook avait traduit le texte part « En effet, quelque chose ne tourne pas rond chez les musulmans », les traducteurs du Conseil ont suggéré la traduction suivante « Quelque chose ne tourne pas rond chez ces musulmans-là ». Ils ont également indiqué que les termes employés n’étaient ni péjoratifs ni violents.
Les experts en matière de contexte du Conseil ont noté que, même si les discours haineux envers les groupes musulmans minoritaires sont fréquents et parfois virulents au Myanmar, les déclarations faisant référence à la mauvaise santé mentale ou à l’instabilité psychologique des musulmans n’étaient pas prédominantes dans cette publication.
Pris dans son contexte, le Conseil estime que le texte doit être considéré comme un commentaire sur l’incohérence manifeste entre la réaction des musulmans face aux évènements qui ont eu lieu en France et leurs réactions face aux évènements qui ont lieu en Chine. Cette liberté d’exprimer une opinion est protégée par les Standards de la communauté Facebook et ne peut être qualifiée de discours haineux.
Prenant en considération les normes internationales en matière de droits de l’homme sur la restriction de la liberté d’expression, le Conseil a estimé que, même si la publication pouvait être considérée comme péjorative ou offensante envers les musulmans, elle ne prônait pas la haine et n’encourageait pas intentionnellement à commettre quelque forme de préjudice que ce soit. À ce titre, le Conseil considère qu’il n’est pas nécessaire de supprimer le contenu pour protéger les droits des autres.
Le Conseil a également souligné que la sensibilité de Facebook à l’égard du discours haineux anti-musulman était compréhensible, notamment en raison des violences et des discriminations dont ont été victimes les musulmans au Myanmar et du risque accru d’un regain à l’approche des élections générales de novembre 2020. Toutefois, pour cette publication en particulier, le Conseil a conclu que Facebook avait eu tort de supprimer le contenu.
La décision du Conseil de surveillance
Le Conseil de surveillance annule la décision de Facebook de supprimer le contenu et demande à ce que la publication soit restaurée.
Pour obtenir plus d’informations :
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Mise à jour le 28/01/2021 à 17h00 GTM À la suite de la décision prise sur le cas du Myanmar, deux paragraphes de la section 8 ont été mis à jour par le Conseil concernant les blessures physiques et l’intégrité mentale, afin de représenter plus précisément les conclusions du Conseil.